L’agroforesterie est une pratique ancestrale de plus en plus mise en avant par les politiques liées aux changements climatiques. Elle associe des arbres avec des cultures et des animaux sur une même parcelle, contrairement à la monoculture qui utilise une seule espèce végétale sur une parcelle. Elle présente plusieurs avantages, parmi lesquels figurent la capacité à stocker du carbone à long terme, la régulation des attaques parasitaires sur les cultures, et la limitation de l’érosion des sols. Le projet Agrobranche, auquel participe IMT Mines Alès, s’est intéressé pendant 4 ans à la valorisation des branches d’arbres, depuis le territoire d’approvisionnement jusqu’à la transformation industrielle. En ligne de mire : l’utilisation de la matière végétale pour le domaine des matériaux et de la chimie biosourcée.
L’objectif du projet était « d’étudier la possibilité de renforcer le modèle économique de l’agroforesterie en améliorant la valorisation des branches d’arbres dans les nouveaux domaines des matériaux et de la chimie biosourcée » indique Nicolas Le Moigne, chercheur en sciences des matériaux à IMT Mines Alès. « Dans les systèmes agroforestiers, les espaces occupés par les arbres sur la parcelle réduisent la surface agricole, il est donc important de s’intéresser à la production de biomasse valorisable » indique Fabien Liagre, agro-économiste chez Agroof, un bureau d’étude chargé d’organiser le projet Agrobranche. La valorisation des branches d’arbres peut par exemple se faire en transformant celles-ci en renforts pour matériaux composites, qui peuvent ensuite être utiles dans le secteur du bâtiment pour fabriquer le platelage ou des panneaux de particules, ou encore dans le secteur automobile pour fabriquer le revêtement des portières.
L’agroforesterie pour des composites biosourcés compétitifs
Pour savoir si les biomatériaux élaborés au sein du projet ont des performances au moins aussi bonnes que celles des standards commercialisés, les chercheurs d’IMT Mines Alès ont réalisé une série de tests. « Nous avons notamment réalisé des essais de traction et de choc pour tester les propriétés mécaniques de ces matériaux » explique Nicolas Le Moigne. Au final, la rigidité et la résistance à l’impact des composites élaborés à partir des différentes essences de bois agroforestier étudiées (noyer, peuplier, châtaignier et chêne) sont pertinentes en tant que biomasse de renfort pour des matériaux composites biosourcés à base de bois.
L’une des idées d’Agrobranche était aussi de s’intéresser à l’impact de la préparation de la biomasse sur ses propriétés. Les scientifiques du projet ont montré que l’influence de cette préparation – qui comprend notamment des étapes de séchage, de broyage des branches en copeaux et de criblage de ces derniers – avait autant d’importance que l’essence de bois utilisée. Ce résultat signifie qu’avec une essence d’arbre locale, « on peut obtenir une biomasse de renfort d’aussi bonne qualité que celle d’une autre région, moyennant un travail de préparation bien maitrisé » pointe Nicolas Le Moigne. Cela permettrait ainsi de limiter les transports de matières, émetteurs de gaz à effet de serre, et de valoriser les ressources locales grâce à la production agroforestière.
Un système de production intéressant pour les industriels
Pour que l’agroforesterie soit viable à l’échelle industrielle, il est nécessaire que les filières agroforestières soient organisées et produisent des volumes de biomasse en adéquation avec les besoins des industries, tout en restant vertueuses sur le plan environnemental. À ce titre, « les industriels montrent un fort intérêt pour l’utilisation de produits biosourcés » explique Fabien Liagre.